L’hyperconnexion se définit comme une connexion excessive aux technologies de la communication et de l’information. Elle concerne les collaborateurs submergés par un afflux continu d’informations au travail à base d’e-mails, de notifications, mais aussi de messageries instantanées, d’alertes SMS, de flux venant de divers canaux, quasiment en continu. Selon certains experts, elle se caractérise par un temps d’écran supérieur à 7h30 par jour (en cumulant activité professionnelle, récréative, etc).
Elle est à différencier de la cyberdépendance où la pratique des écrans devient la seule source de plaisir et de bien-être.
Qui est concerné ?
Selon les résultats 2021 du baromètre de la Fondation April, 7 Français sur 10 se disent incapables de se passer d’objets connectés, ne serait-ce qu’une seule journée. Un adulte consulterait son smartphone 211 fois par jour…
Une étude menée par le service de réseau privé Nord VPN en juin 2021 a montré qu’un Français passe 56 heures par semaine devant un écran, ce qui revient au cours de l’existence à 27 ans, 7 mois et 6 jours, soit plus de temps qu’à dormir !
Le téléphone portable est devenu le premier support pour lire ses e-mails. 61 % des messages électroniques sont ouverts à partir des interfaces mobiles (smartphones et tablettes). Ce qui veut dire qu’ils sont consultables à tout moment et en tout lieu, ce qui favorise l’hyperconnexion.
Les risques pour la santé physique
La plainte la plus fréquente concerne les yeux : fatigue visuelle, picotements, rougeur, sensation de brûlure, voire myopie en lien avec des facteurs d’accommodation et de convergence.
Viennent ensuite les troubles musculosquelettiques des membres supérieurs : épaules, poignet, et les douleurs cervicales et dorsales.
S’y ajoutent les risques liés à la posture assise qui induit la sédentarité avec son cortège d’effets délétères : hypertension artérielle, diabète, surpoids, obésité, hypercholestérolémie.
De plus, une exposition trop importante à la lumière bleue des écrans rend difficile l’endormissement, ce qui entraîne une réduction du temps de sommeil et des risques de surmenage ou de burn-out.
Le télétravail vient aggraver le phénomène car il a tendance à étirer la durée de travail. Or, le risque d’accident vasculaire cérébral augmente de 33 % pour ceux qui travaillent plus de 55 heures par semaine.
Les risques pour la santé mentale
Le travail sur écran favorise les troubles psychosociaux et le stress : effacement des frontières entre vie privée et vie professionnelle, impact sur la vie privée engendrant un manque de disponibilité et de la culpabilité, mais aussi de l’anxiété par peur de manquer une information.
L’hyperconnexion ouvre la porte, enfin, à des comportements dangereux : utilisation du téléphone portable en marchant, en conduisant un véhicule…
Les risques pour la qualité du travail
Les stimulations continuelles liées à l’hyperconnexion induisent un déficit de concentration et d’attention qui rendent les priorisations difficiles à sélectionner. Un comportement « multi-tâches » nuit à la créativité et favorise une réduction de l’activité à des tâches mineures qui ne sont pas nécessairement prioritaires, aux dépens de missions complexes qui demandent du temps et de la réflexion.
Les risques pour la vie sociale
L’afflux d’informations lié à l’hyperconnexion nuit à l’échange verbal avec les collègues, mais aussi avec la famille et les amis. Cela produit de l’indisponibilité aux autres, de la culpabilité et des difficultés relationnelles.
Un risque à évaluer dans l’entreprise
Si le droit à la déconnexion est inscrit dans la loi depuis 2017, il est insuffisant. Le problème est à traiter sous l’angle plus vaste de la cyberdépendance.
Sachant qu’un salarié dans le cadre de son activité professionnelle passe en moyenne 20 heures par semaine devant un écran, les entreprises doivent se préoccuper de la santé de leurs salariés et mettre tout en œuvre pour protéger la santé physique et mentale des travailleurs (article L. 4121-1 du Code du travail).
L’hyperconnexion est un risque professionnel que l’employeur doit évaluer et intégrer dans le Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) avec les représentants du personnel et le service de prévention et de santé au travail.
Conseils à l’employeur pour prévenir l’hyperconnexion
– Sensibiliser le personnel de l’entreprise aux risques de l’hyperconnexion, voire de la cyberaddiction, sur les risques physiques et psychologiques encourus, dont la perte de concentration, la diminution de l’efficacité au travail, les difficultés relationnelles.
– Prévenir les désordres physiques
- Veiller à l’ergonomie des postes de travail.
- Conseiller les salariés pour réduire la fatigue visuelle et la sécheresse oculaire (20 secondes de pause toutes les 20 minutes pour regarder au loin, au-delà de 5 mètres) ainsi que les douleurs des épaules et du dos.
- Sensibiliser aux bonnes postures.
- Inviter à des pauses pendant la journée.
- Déconseiller de déjeuner devant son ordinateur, mais inciter les collaborateurs à prendre une véritable pause-repas qui offre l’occasion de marcher et d’échanger avec les collègues.
- Proposer des exercices d’échauffement et d’étirement sur le lieu de travail.
- Inciter les salariés en télétravail à faire des pauses et des exercices par exemple, au moyen de vidéos rappelant les bonnes pratiques.
– Prévenir les troubles psychologiques
- Proposer aux collaborateurs des auto-tests validés scientifiquement qui font le point sur la cyberdépendance.
- Inciter à mettre une distance entre vie professionnelle et vie personnelle : à mettre en place, pendant les week-ends et les vacances, un message d’absence sur la boite mail et le téléphone professionnel, et à désactiver les notifications si le téléphone personnel accueille aussi les messages professionnels, ou à désinstaller la boite mail professionnelle les jours non travaillés.
- Inciter à fermer le téléphone professionnel et l’ordinateur au moins 1h30 avant le coucher, et à rallumer le téléphone peu de temps avant de quitter le domicile.
– Prendre des mesures organisationnelles
- Mettre en place des solutions pour mesurer l’utilisation des outils numériques : courriel, messagerie, smartphones au niveau individuel et au niveau collectif.
- Inciter à ne pas emporter son ordinateur professionnel à la maison après la journée de travail.
- Instaurer des moments sans téléphone : pendant les repas, les moments conviviaux, les loisirs, au-delà d’une certaine heure…
- Inviter à privilégier les échanges verbaux plutôt que les mails et les SMS, et à n’utiliser l’e-mail que s’il est plus judicieux et mieux adapté.
- Lutter contre la surinformation : inciter à ne pas mettre en copie des mails des personnes non intéressées par le sujet et à ne pas cumuler mail et téléphone pour la même sollicitation, dans l’espoir d’une réponse plus rapide.
- Rappeler d’éviter le « phobbing » qui revient à privilégier l’interaction avec son smartphone plutôt que de prêter attention ou d’interagir avec un interlocuteur.
- Proposer des ateliers pour permettre à une équipe de s’interroger sur ses pratiques et d’imaginer des pistes d’amélioration.
- Rappeler le droit à la déconnexion inclus dans la loi Travail du 8 août 2016.
- Rédiger une charte informatique sur la gestion des outils numériques et la mise en place de dispositifs permettant notamment leur limitation.